Tableau vivant

Publié le par Antine@

             Poussez doucement la porte, installez-vous et regardez... Ils n'ont pas l'air et pourtant si... Ils travaillent...Le spectacle vaut son pesant de cacahuètes... Sur la gauche, au deuxième rang un porc-épic blond essaie de tracer un tableau avec sa règle. On dirait une poule qui vient de trouver un peigne et qui se demande ce qu'elle va faire avec ce truc. Il tourne et retourne sa feuille et, du coin de l'œil, je guette le moment où il va faire un gros pâté sur sa feuille...Il prend la chose jadis transparente mais aujourd'hui plus taguée que les parois d'un train de banlieue et la retourne plusieurs fois, se rendant compte que les graffitis l'empêchent de lire les graduations. En toute logique, il procède donc au nettoyage de la chose à l'aide d'une pointe de compas... Il va bien y passer l'heure... Derrière lui un étrange duo : le crabe dormeur et la mouche fly-toxée... Si, si... Un genre de Pierrot lunaire tout droit sorti d'une autre planète et qui regarde le tableau d'un air étonné avec, à côté de lui, une mouche agitée, brune, qui a déjà changé quatorze fois de positions depuis le début de cette chronique. Derrière, seul à sa table, l'ahuri de service... « Allô, la Lune ? Ici la Terre... » Il vient déjà de me poser quatre questions auxquelles j'avais répondu durant l'explication du travail et, la crête collée au gel Dop, se demande comment il va venir à bout du travail. Et voilà ! Il vient de faire tomber sa trousse et de répandre sur le sol de quoi ravitailler la papeterie voisine pour deux années scolaires. Je suis stupéfait par tout le matos dont ils ont besoin pour ne rien foutre ! Non, vous ne rêvez pas, ce n'est pas un zoo, simplement une classe de sixième ordinaire d'un collège ordinaire... Au milieu de la classe le groupe des pies... Une bande de souris à lunettes très mignonnes mais que les parents ont du vacciner avec l'aiguille d'un vieux phonographe. Elles jacassent sans cesse et me regardent en souriant... Heureusement que ce sont de bonnes élèves sinon je leur ferais plus souvent des remarques...

            Au centre, le présentoir de Castorama dont quelques lointains ancêtres doivent être issus de croisements hasardeux entre les descendants de l'homo sapiens et des représentants de la famille des castoridés. Il est en train de ronger un stylo qui ressemble à une vieille chique délavée... Apparemment il trouve ça bon... Dommage que nous ne soyons pas fin juin... On aurait pu le mettre dans un cerisier... Avec toutes ses breloques qui brillent, au moins ils aurait fait peur aux oiseaux et aurait perdu, pour quelques temps son statut d'inutilité publique...

            Je pourrais continuer à vous dépeindre la galerie de portraits des vingt-cinq élèves mais ce serait sans intérêt...L'essentiel était pour moi de vous faire sourire avec ce que j'ai sous les yeux... Je vous abandonne quelques instants... Je vais passer dans les rangs voir comment ils s'en sortent...

            Je viens d'expliquer des trucs et la bande de joyeux bouffons est en train de recopier ce qui est au tableau... Info de dernière minute : histoire d'avoir l'air encore plus niais, le présentoir de Castorama, pendant que j'écrivais au tableau s'est barbouillé toutes les phalanges avec du blanco correcteur et a ensuite colorié le tout avec des fluos de couleurs différentes...  C'est du plus bel effet... Manquerait plus que ça se mette à clignoter... A mon avis, celui-là, à part une plume là où je pense, je vois pas trop ce qui lui manque.

            Ce ne sont que quelques instantanés, quelques images volées à la vie d'une classe où vingt-cinq élèves vivent quotidiennement et semblent même assez heureux... Après tout, comme disait l'éminent Albert Einstein : « L'école devrait toujours avoir pour but de donner à ses élèves une personnalité harmonieuse, et non de les former en spécialiste. »

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E
c 'est comme ça dès la sixième,plus de répit alors!!!
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A
<br /> Ben oui ils sont comme ça les chérubins... Mais c'est aussi comme ça qu'on les aime. Pour être franc les faces de navets insipides et trop calmes m'agacent un peu...<br /> J'aime les vivants...<br /> Bisous<br /> <br /> <br />
S
Bon, alors à ma grande surprise, over-blog se kikoo-lol-spécialise, comme un vulgaire skyblog. Alors, le formulaire de commentation passe désormais en très gros caractères, pour que Mr Castorama ne se fasse pas plus mal aux noeils qu'il ne le fait déjà en se les frottant avec ses doigts plein de peinture blanche, et passe par dessus le texte, parce que visiblement, ceux-ci ne doivent globalement pas présenter le moindre intérêt lorsqu'on tente de les commenter.<br /> C'est donc avec une grande prudence que je m'apprête à dire ce que je vais dire, ne pouvant pas regarder le texte...<br /> <br /> J'ai bien aimé le tableau, mais. Voilà. Ca, c'est pour dire que ce n'est pas parfait à mon goût. En fait, je trouve que les passages qui nous rappellent que "c'était juste pour dire" gâchent un peu la féérie du machin. Et puis ça manque d'ironie, voire de cruauté, pour me combler parfaitement. Mais sinon, c'est toujours marrant de voir que déjà en sixième, les morveux ont lâché l'affaire. Moi, j'ai attendu le lycée, quand même...<br /> Bonne journée.
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A
<br /> J'apprécie vraiment ton com parce qu'il est constructif et que je comprends tout à fait les critiques que tu formules. "pas assez cruel" dis-tu... C'est en partie vrai car même si certains de mes<br /> élèves ont un QI voisin de celui d'une huître après un séjour prolongé sous une lampe à bronzer, au quotidien, je les vois souffrir. Alors même si j'ai parfois la dent dure, par respect pour leur<br /> souffrance, je modère mes propos. Et sais-tu de quoi ils souffrent ? Ils se rendent compte certains que leurs parents les délaissent et ce mot est souvent une pâle formulation de la réalité...<br /> Coluche disait : "Y'a des gens ils ont des gosses parce qu'ils ne peuvent pas avoir ce chiens..." J'en connais... Vraiment... Tiens ça me donne une idée : une chronique sur les parents d'élèves...<br /> A creuser...<br /> Tu vois que tu as bien fait d'émettre ces critiques...<br /> Amitiés<br /> <br /> <br />
F
je n'ai qu'un mot : excellent
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A
<br /> Merci beaucoup de ta visite et de cette appréciation élogieuse... J'essaie, mêm si ce n'est pas toujours facile de faire sourire avec ce qui, dans de tels moments, me fait aussi sourire...<br /> Je vais passer chez toi ce soir...<br /> Amitiés<br /> <br /> <br />
R
Encore une fois, je me suis régalée à cette lecture. Ce tableau est plus que vivant. J'ai carrément l'impression d'y être. J'ai été une ado rêveuse et plutôt tranquille en classe et j'aimais par dessus tout observer les autres. Alors quand je te lis, tant de souvenirs remontent à la surface. Sans compter que tes mots sont remplis d'humour et porteurs de vie. Merci pour ce partage. Et, j'espère que tu nous régaleras encore de ces tableaux vivants. Bisous.
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A
<br /> Merci d'avoir apprécié ce tableau écrit directement en classe par petits instantanés et retravaillé ensuite... Il est souvent amusant de voir les enfants agir et je vais te faire une confidence...<br /> les adultes aussi... Parfois je regarde certains de mes collègues avec un oeil d'ethnologue et c'est très instructif...<br /> Bisous<br /> <br /> <br />
S
Bonjour,<br /> la façon de présenter cette galerie de portraits vaut aussi son pesant de peanuts !<br /> Bon courage !<br /> Musique très agréable, ainsi que la présentation de ton blog. A bientôt.
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A
<br /> Merci d'être venue et d'avoir souri devant cette galerie de "têtes blondes"... Ils sont adorables et pénibles mais on les aime comme ça...<br /> Tu as vu qu'il y avait dans les chroniques INDIGANTIONS ORDINAIRES d'autres textes sur le thème de l'école... ?<br /> Tu y trouveras je pense d'autres peanuts à grignoter....<br /> Bisous<br /> <br /> <br />